Charge de la preuve du bail : la seule occupation des lieux ne suffit pas à établir la relation locative(Cass. com. 2023)

Réf : 34518

Identification

Réf

34518

Juridiction

Cour de cassation

Pays/Ville

Maroc/Rabat

N° de décision

109

Date de décision

09/02/2023

N° de dossier

2021/2/3/915

Type de décision

Arrêt

Chambre

Commerciale

Abstract

Thème

Commercial, Bail

Base légale

Article(s) : 399 - Dahir du 12 septembre 1913 formant Code des obligations et des contrats (D.O.C)

Source

Non publiée

Résumé en français

En vertu de l’article 399 du Dahir des Obligations et Contrats (DOC), il appartient à celui qui réclame l’exécution d’une obligation d’en prouver l’existence.

Viole ce principe et inverse la charge de la preuve, la cour d’appel qui déduit l’existence d’une relation locative du seul fait que le demandeur justifie être propriétaire du local objet du litige par un acte de vente et que le défendeur a été trouvé dans les lieux lors de la signification d’une mise en demeure.

En effet, en statuant ainsi sans exiger du demandeur qu’il rapporte la preuve de l’obligation locative dont il se prévaut, et en imposant implicitement au défendeur de prouver l’absence d’un titre légal justifiant son occupation, la cour d’appel a méconnu les règles régissant la charge de la preuve telles qu’établies par l’article 399 du DOC précité.

Par conséquent, la décision d’appel, n’ayant pas donné de base légale à sa décision en ne s’assurant pas que le demandeur avait satisfait à la charge de la preuve lui incombant, encourt la cassation.

Texte intégral

وبعد المداولة طبقا للقانون

بناء على مقال الطعن المودع بتاريخ 2021/04/16 من طرف الطالب المذكور أعلاه بواسطة نائبه الأستاذ (ع. م.)، الرامي إلى نقض القرار رقم 29 الصادر بتاريخ 2021/01/06 في الملف عدد 2020/8206/2847 عن محكمة الاستئناف التجارية بالدار البيضاء.

حيث يستفاد من وثائق الملف والقرار المطعون فيه أن المطلوب سبق له أن تقدم أمام المحكمة التجارية بالرباط بمقال افتتاحي بتاريخ 2019/12/25 عرض فيه بأنه أكرى للطالب المحل التجاري المملوك له والكائن بعنوانه أعلاه بسومة شهرية قدرها 1200 درهم، وأنه توقف عن أداء الواجبات الكرائية عن المدة من يناير 2014 إلى يوليوز 2019 وجب عنها مبلغ 79000 درهم امتنع عن أدائها رغم توجيه إنذار له بدون جدوى ملتمسا الحكم عليه بأدائه له تعويضا عن التماطل محددا في مبلغ 3000 درهم وبإفراغه من العين المكتراة هو ومن يقوم مقامه أو بإذنه، وبعد انتهاء الإجراءات قضت المحكمة التجارية بأداء الطالب للمطلوب تعويضا عن التماطل قدره 2500 درهم وبإفراغه من العين المكتراة، أيدته محكمة الاستئناف التجارية بالقرار المطلوب نقضه.

حيث يعيب الطاعن القرار الاستئنافي في الوسيلة الأولى للنقض بنقصان التعليل الموازي لانعدامه، بدعوى أن المحكمة مصدرته اعتبرت العلاقة الكرائية ثابتة بين الطرفين من خلال عقد البيع الذي استشفت منه تملك المطلوب للمحل التجاري، والذي لم يدل إلا بنسخة منه خلافا المقتضيات الفصل 440 من قانون الالتزامات والعقود، وكذا من خلال توصله بالإنذار بالمحل المدعى فيه رغم أن تواجده به قد يكون لأسباب أخرى غير العلاقة الكرائية، معتبرا أن القرار الاستئنافي متسما بضعف التعليل الموازي لانعدامه ملتمسيا تقضيه.

حيث إن إثبات الإلتزام على مدعيه طبقا للفصل 399 من ق.ل.ع، وأن المحكمة مصدرة القرار المطعون فيه لما عللت قرارها ب: « إن الصفة ثابتة للمستأنف عليه- أي المطلوب في النقض – حسب الثابت من عقد البيع المستدل به وكذا محضر تبليغ الإنذار الذي يثبت تواجد الطاعن (أي الطالب) بالمحل موضوع النزاع، والذي لم يستدل للمحكمة بأي سند قانوني مقبول قانونا يخالف الادعاء عليه كمكتري … « ، واعتبرت عن غير صواب أن العلاقة الكرائية ثابتة بين طرفي الدعوى من خلال عدم إدلاء الطالب كمكتري بما يخالف الادعاء عليه، ودون أن تكلف المدعي (المكري) بإثبات الإلتزام الذي يدعيه، وقلبت عبء الإثبات مع أن مقتضيات الفصل 399 من ق.ل.ع تقضي بأن إثبات الالتزام على مدعيه، وهي بنهجها لم تجعل لما قضت به من أساس وعرضت قرارها للنقض.

لهذه الأسباب

قضت محكمة النقض بنقض القرار المطعون فيه وبإحالة القضية والأطراف على نفس المحكمة مصدرته لتبت فيه بهيئة أخرى طبقا للقانون وبتحميل المطلوب في النقض الصائر.

وبه صدر القرار، وتلي بالجلسة العلنية المنعقدة بالتاريخ المذكور أعلاه بقاعة الجلسات الاعتيادية بمحكمة النقض بالرباط. وكانت الهيئة الحاكمة متركبة من رئيسة الغرفة السيدة خديجة الباين رئيسة، والمستشارين السادة عبد الرفيع بوحمرية مقررا ومحمد الكراوي والسعيد شوكيب وعبد الرزاق العمراني أعضاء، وبمحضر المحامي العام السيد محمد صادق، وبمساعدة كاتب الضبط السيد عبد الرحيم ايت علي.

Version française de la décision

Après en avoir délibéré conformément à la loi

Vu la requête en cassation déposée le 16/04/2021 par le demandeur susmentionné par l’intermédiaire de son avocat Maître (A.M.), tendant à la cassation de l’arrêt n° 29 rendu le 06/01/2021 dans le dossier n° 2020/8206/2847 par la Cour d’appel de commerce de Casablanca.

Attendu qu’il ressort des pièces du dossier et de l’arrêt attaqué que le défendeur au pourvoi avait préalablement saisi le Tribunal de commerce de Rabat par une requête introductive d’instance en date du 25/12/2019, dans laquelle il exposait avoir donné à bail au demandeur au pourvoi le local commercial lui appartenant, sis à l’adresse susmentionnée, moyennant un loyer mensuel d’un montant de 1200 dirhams, et qu’il avait cessé de payer les loyers pour la période allant de janvier 2014 à juillet 2019, dont le montant s’élève à 79 000 dirhams, qu’il a refusé de les régler malgré la mise en demeure qui lui a été adressée, restée infructueuse ; sollicitant sa condamnation à lui payer une indemnité pour résistance abusive fixée à la somme de 3000 dirhams et son expulsion des lieux loués, lui-même et tous occupants de son chef ou avec son autorisation ; qu’à l’issue de la procédure, le Tribunal de commerce a condamné le demandeur au pourvoi à payer au défendeur au pourvoi une indemnité pour résistance abusive d’un montant de 2500 dirhams et a ordonné son expulsion des lieux loués ; jugement confirmé par la Cour d’appel de commerce par l’arrêt dont la cassation est demandée.

Attendu que le demandeur au pourvoi reproche à l’arrêt d’appel dans le premier moyen de cassation un manque de motivation équivalant à son absence, au motif que la Cour qui l’a rendu a considéré la relation locative comme établie entre les parties sur la base de l’acte de vente duquel elle a inféré la propriété du défendeur au pourvoi sur le local commercial, acte dont seule une copie a été produite en violation des dispositions de l’article 440 du Dahir des Obligations et Contrats, ainsi que sur la base de sa réception de la mise en demeure dans les lieux litigieux, alors que sa présence en ces lieux pourrait être due à d’autres motifs que la relation locative ; considérant que l’arrêt d’appel est entaché d’un défaut de motivation équivalent à son absence, il en sollicite la cassation.

Attendu que la preuve de l’obligation incombe à son créancier conformément à l’article 399 du D.O.C., et que la Cour ayant rendu l’arrêt attaqué, en motivant sa décision par : « Que la qualité de l’intimé – c’est-à-dire le défendeur au pourvoi – est établie selon ce qui ressort de l’acte de vente produit ainsi que du procès-verbal de notification de la mise en demeure qui atteste la présence du demandeur au pourvoi (c’est-à-dire le requérant) dans le local objet du litige, lequel n’a produit devant la Cour aucun titre juridique légalement admissible contredisant l’allégation le désignant comme preneur… », a considéré à tort que la relation locative était établie entre les parties au litige au motif que le demandeur au pourvoi, en tant que preneur, n’avait pas produit d’élément contraire à l’allégation portée contre lui, et sans mettre en demeure le demandeur (bailleur) de prouver l’obligation qu’il allègue, a inversé la charge de la preuve, alors que les dispositions de l’article 399 du D.O.C. prescrivent que la preuve de l’obligation incombe à son créancier ; elle, par cette démarche, n’a pas donné de base légale à ce qu’elle a jugé et a exposé son arrêt à la cassation.

PAR CES MOTIFS

La Cour de cassation casse l’arrêt attaqué et renvoie l’affaire et les parties devant la même Cour qui l’a rendu pour qu’il y soit statué par une autre formation conformément à la loi et met les dépens à la charge du défendeur au pourvoi.

Ainsi fait et jugé et prononcé en audience publique tenue à la date susmentionnée, en la salle d’audience ordinaire de la Cour de cassation à Rabat. Siégeaient dans la formation de jugement : Madame Khadija EL BAINE, Présidente de Chambre, Présidente ; et Messieurs les Conseillers Abderrafie BOUHAMRIA, Rapporteur, Mohamed EL KERAOUI, Said CHOUKIB et Abderrazak EL AMRANI, membres ; En présence de Monsieur l’Avocat Général Mohamed SADEK ; Avec l’assistance de Monsieur le Greffier Abderrahim AIT ALI.

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