Il est établi que l’acquéreuse, après exécution intégrale de ses obligations contractuelles, a constaté, dès la réception du fonds commercial, de graves malfaçons et vices cachés, confirmés par une expertise technique réalisée en application des dispositions du Code de procédure civile. Ces défauts concernaient à la fois les gros œuvres et les seconds œuvres, notamment une plomberie non conforme aux normes (canalisations incomplètement raccordées et atteinte à la structure), rendant le bien impropre à l’exploitation commerciale.

Sur le fondement des articles 549 et 556 du Dahir formant Code des obligations et des contrats, le tribunal a retenu que le vendeur est tenu de livrer la chose vendue exempte de vices cachés qui en diminuent la valeur ou la rendent impropre à l’usage. Constatant la violation de cette obligation, la juridiction a prononcé la résolution du contrat de vente et ordonné la restitution intégrale du prix, majorée des intérêts légaux, tout en écartant les demandes d’indemnisation non fondées en droit.

S’agissant de la compétence, le tribunal de commerce, saisi en premier lieu, a examiné l’exception d’incompétence soulevée et retenu qu’il demeurait compétent, considérant qu’il s’agissait d’un litige né de la cession d’un fonds de commerce. Il a ainsi statué au fond en application de la loi n° 53.95, rejetant la thèse d’une compétence exclusivement civile.

Au vu de la requête introductive d’instance présentée par la demanderesse, par l’intermédiaire de son mandataire, devant cette juridiction, enregistrée au greffe et assortie du paiement des frais de justice en date du 20/11/2023. Dans cette requête, la demanderesse expose qu’elle a procédé à l’achat du fonds de commerce sis à l’immeuble RAVINA, à l’angle de la rue Abou Imrane El Fassi et de la rue « As-Soukhour As-Sawda », à Casablanca, auprès de la défenderesse, pour la somme de cent vingt (120) millions de centimes (environ 1 200 000 dirhams). Elle joint le « contrat de vente » établi par acte notarié. Elle ajoute avoir agi de bonne foi en s’acquittant de la totalité du montant convenu et de toutes ses obligations à l’égard de la défenderesse, prise en la personne de son représentant légal et propriétaire, M. Larbi (B.).

Toutefois, dès la remise du fonds à la demanderesse pour qu’elle l’aménage en vue de l’activité commerciale qu’elle entendait y exercer, elle a constaté que ce local présentait de graves vices, se traduisant par l’apparition de fissures susceptibles de causer d’importants dommages et par des infiltrations d’eaux usées à l’intérieur du fonds, contrairement à ce qui avait été convenu et à ce qui incombait à la défenderesse de respecter et d’exécuter. La demanderesse n’a eu d’autre recours que de contacter le représentant légal de la défenderesse et propriétaire dudit fonds afin qu’il procède aux réparations nécessaires, et ce, pour éviter que des dommages plus sérieux ne surviennent ultérieurement sur le fonds acquis au prix de 120 millions de centimes. Or, la défenderesse n’a entrepris aucune démarche pour réparer ce qui pouvait l’être, ne s’est nullement souciée de ses alertes, et toutes les tentatives amiables de la demanderesse ont échoué. Face à cette situation, le local est resté fermé et la demanderesse ne l’a jamais exploité depuis la date de sa prise de possession jusqu’à ce jour.

Plus tard, alors qu’elle s’y rendait pour vérifier l’état des lieux, la demanderesse a été choquée par l’étendue des graves dommages subis : le local est devenu un véritable réceptacle d’eaux usées, où se forment de grandes mares, provoquant des odeurs nauséabondes, la détérioration, l’écaillage et le changement de la peinture des murs ainsi qu’une humidité visible partout dans le local. Face à cette situation catastrophique et dangereuse, rendant toute utilisation ou démarrage d’activité commerciale impossible du fait des odeurs nauséabondes et des graves dommages relevés, la demanderesse a établi un procès-verbal de constat, accompagné de photographies.

La cause principale des dommages affectant le local a été déterminée par une expertise immobilière ordonnée par Monsieur le Président du Tribunal civil de Casablanca, en vertu de l’ordonnance n° 25193/1101/2023. L’expert désigné a conclu que l’origine principale des graves dommages dont souffre le local réside dans la défaillance totale des canalisations, un risque permanent d’inondations pouvant survenir à tout moment en raison de la mauvaise exécution du réseau d’assainissement, liée à un manque de compétences, à l’emploi de matériaux de qualité médiocre, au non-respect des plans et des cahiers des charges, ainsi qu’à un défaut d’expérience dans la gestion du projet. Une copie du rapport d’expertise est jointe.

À la suite de cela, la demanderesse a fait parvenir une mise en demeure à la défenderesse, remise en mains propres à son représentant légal, l’invitant à régulariser la situation et à verser une indemnisation à la demanderesse. Ladite mise en demeure étant restée sans réponse, une copie de celle-ci et du procès-verbal de sa signification est versée aux débats.

Il ressort des pièces du dossier que la demanderesse s’est acquittée de l’intégralité de ses obligations légales, notamment le paiement du prix, en conformité avec le principe de bonne foi. Alors même que l’acquéreur a pleinement satisfait à tous ses engagements contractuels et légaux, la défenderesse a manqué à son obligation légale, en lui délivrant le bien objet du litige dans un état non conforme à ce qui avait été convenu contractuellement et à ce qui est légalement requis. Or, il est constant en droit que le vendeur est tenu de livrer la chose vendue exempte de tout vice, apparent ou caché, et qu’il est tenu d’indemniser l’acquéreur lorsqu’un vice est établi sur la chose vendue. L’article 549 du Code des obligations et des contrats est clair quant à l’obligation pour le vendeur de garantir les vices qui diminuent sensiblement la valeur de la chose ou la rendent impropre à l’usage.

La demanderesse a établi la preuve du vice par l’expertise réalisée et a respecté la procédure de mise en demeure dans les formes prévues par la loi. La responsabilité de la société venderesse s’en trouve donc engagée et elle se trouve redevable d’une indemnisation, ayant contrevenu aux règles contractuelles et légales prescrites par le Dahir des obligations et des contrats et la loi relative à la protection du consommateur. La demanderesse est ainsi fondée à saisir la juridiction compétente pour obtenir l’indemnisation légale, réparer le préjudice subi et les vices et pertes constatés, conformément aux règles d’équité, de justice et de droit.

Dans sa requête introductive, la demanderesse conclut en demandant à la juridiction de :

• Déclarer sa demande recevable sur la forme et bien fondée au fond.
• Condamner la défenderesse, la société (B.) à associé unique, prise en la personne de son représentant légal et propriétaire, M. Larbi (B.), à faire cesser l’intégralité des dommages et à réparer tous les désordres subis par le local de la demanderesse sis à l’immeuble Rafina, angle de la rue Abou Imrane El Fassi et de la rue As-Soukhour As-Sawda à Casablanca, sous astreinte de 1 000 dirhams par jour de retard.
• Condamner la défenderesse, la société (B.) à associé unique, prise en la personne de son représentant légal et propriétaire, M. Larbi (B.), à verser la somme de 120 000,00 dirhams (cent vingt mille dirhams) à titre de dommages-intérêts en faveur de la demanderesse.
• Subsidiairement, à titre préalable, ordonner une expertise technique immobilière par un expert spécialisé afin de constater les vices apparents affectant la chose vendue et d’évaluer le préjudice subi par la demanderesse, avec exécution provisoire de la décision et condamnation de la défenderesse aux dépens.

Au vu du courrier joint déposé par la demanderesse, par l’intermédiaire de son mandataire, à l’audience du 26/12/2023, indiquant qu’elle produit les pièces suivantes : attestation de propriété, contrat de vente, procès-verbal de constat et expertise immobilière, sollicitant leur jonction au dossier et le jugement conformément à la requête introductive de la demanderesse.

Au vu du mémoire en réponse sur la compétence soulevée par la défenderesse, produit par l’intermédiaire de son mandataire à l’audience du 26/12/2023, soutenant, à titre de moyen préalable, en vertu des dispositions de l’article 8 de la loi n° 53.95 portant création des tribunaux de commerce, que la présente affaire, introduite par un particulier et visant la garantie contre des vices affectant un immeuble vendu, échappe au champ d’application de l’article 5 de la même loi régissant la compétence des tribunaux de commerce, et qu’il s’agit d’un litige purement civil relevant de la compétence des tribunaux civils et non de celle du tribunal de commerce. Partant, la défenderesse demande que soit déclaré, par jugement séparé, l’incompétence matérielle du tribunal de commerce de Casablanca et la compétence du tribunal civil de Casablanca, avec toutes les conséquences légales qui en découlent, tout en réservant à la défenderesse le droit de produire ses moyens au fond une fois la question de compétence tranchée par un jugement définitif.

Au vu des réquisitions du Ministère public, concluant à l’incompétence d’attribution et, en conséquence, à la compétence de la présente juridiction pour statuer sur la demande, avec renvoi de la question des dépens à l’issue de la décision sur le fond.

Au vu du renvoi du dossier à la présente juridiction après décision sur la compétence, sous le numéro 2024/8201/4210.

Au vu du mémoire en réponse produit par la défenderesse en date du 14/05/2024, faisant valoir que le dommage ne peut être prouvé par un huissier de justice, celui-ci n’étant pas spécialisé en la matière immobilière, et soutenant par ailleurs que l’expertise invoquée a été réalisée dans le cadre de l’article 148 du Code de procédure civile, c’est-à-dire sans caractère contradictoire. La défenderesse conclut donc au rejet de la demande.

Au vu du mémoire produit par la demanderesse, par l’intermédiaire de son mandataire, en date du 04/06/2024, réitérant ses moyens antérieurs et sollicitant un jugement conformément à sa requête introductive.

Au vu du jugement avant-dire droit daté du 11/06/2024, ordonnant une expertise technique confiée à l’expert M. Mansif Hakim, lequel a déposé son rapport au greffe de la présente juridiction en date du 25/07/2024.

Au vu du mémoire de la demanderesse, déposé par l’intermédiaire de son mandataire le 08/10/2024, après dépôt du rapport d’expertise, demandant l’homologation dudit rapport et concluant à la résolution (ou annulation) du contrat de vente liant la demanderesse à la défenderesse, prise en la personne de son propriétaire et représentant légal, M. Larbi (B.), et au remboursement du prix de vente, fixé à 1 000 000,00 dirhams, outre le versement d’une indemnité de 350 000,00 dirhams, avec intérêts légaux à compter de la date de la demande, exécution provisoire et condamnation de la défenderesse aux dépens.

Au vu du mémoire de la défenderesse, déposé après expertise et comprenant une demande de recours en faux incident, produit par l’intermédiaire de son mandataire et assorti du paiement des droits de justice le 08/10/2024, exposant que, concernant la conclusion de l’expert selon laquelle les travaux de plomberie auraient été effectués de manière non conforme, en ce que le conduit d’évacuation des eaux usées n’aurait pas relié tous les étages et se serait arrêté au niveau de la mezzanine, avec modification du tracé au moyen de coudes de déviation et de débouchage, il s’agit là d’affirmations infondées. En effet, la pratique dans toute construction d’immeuble veut qu’on s’arrête toujours au niveau du rez-de-chaussée et qu’on n’envahisse pas les locaux commerciaux pour préserver leur aspect et leur conception, et qu’on s’appuie sur des coudes (Les coudes) pour dévier et raccorder les eaux usées à la canalisation d’assainissement. Ceci a été respecté dans l’immeuble où se situe le local litigieux.

S’agissant de l’allégation de l’expert selon laquelle les travaux de plomberie n’auraient pas été exécutés conformément aux normes usuelles, car ils auraient touché une poutrelle (poutrelle précontrainte) adjacente au conduit d’alimentation en eau potable, ce qui aurait porté atteinte à la solidité de la dalle, la défenderesse affirme qu’il s’agit d’une fausse allégation, la preuve en étant la « certification de fin de travaux » (pièce n° 1), la « certification de conformité » établie par l’ingénieur des travaux (pièce n° 2), ainsi que les rapports du bureau d’études et du laboratoire de contrôle (pièces n° 3 à 6), tous certifiant que les travaux ont été réalisés dans le respect des normes, sans atteinte à aucune poutrelle adjacente au conduit d’alimentation en eau potable, et que la dalle se trouve en bon état. Sans cela, la demanderesse n’aurait jamais obtenu l’autorisation d’occuper les lieux (raccordée ici à la notion de « permis d’habiter » ou « attestation de conformité »).

La défenderesse soutient alors qu’elle forme un recours en faux incident contre cette partie du rapport de l’expert, l’accusant de se fonder sur un avis contraire à la réalité, ce qui constituerait un faux intellectuel justifiant le recours à la procédure de faux prévue aux articles 89 et suivants du Code de procédure civile, avec toutes conséquences légales.

Quant à l’affirmation de l’expert selon laquelle les infiltrations d’eau visibles sur les murs auraient provoqué une humidité qui aurait abîmé les faux plafonds, la peinture et le système électrique, la défenderesse considère qu’il s’agit d’une assertion infondée, soutenant que ladite humidité n’a aucun lien avec les travaux de plomberie, mais résulte de travaux intérieurs réalisés par la demanderesse (réfection du carrelage, pose d’enduit, etc.). Par ailleurs, la défenderesse indique que le syndicat de copropriété (Syndic) a introduit une action contre la demanderesse, enregistrée sous le numéro 5215/1101/2023 devant la juridiction des référés, laquelle a donné lieu à une ordonnance rendue le 07/11/2023 sous le n° 14686 par le vice-président du Tribunal de première instance de Casablanca, enjoignant à la demanderesse de permettre au Syndic d’accéder aux canalisations d’évacuation des eaux usées pour y faire exécuter les réparations par un plombier qualifié et rétablir la situation conforme, ce qui a été effectué selon le procès-verbal du commissaire de justice, M. Radouane Zakri, en date du 22/02/2024, dans le cadre du dossier d’exécution n° 3955/6201/2023.

La défenderesse ajoute qu’ainsi, les défauts apparus après usage, événement tout à fait normal, n’ont pas été aussi graves que l’a prétendu la demanderesse et que l’expert a inutilement amplifié sans fondement légal. Au surplus, la défenderesse soutient que les réparations ont été effectuées conformément au procès-verbal officiel. Elle conteste le montant global de 170 000,00 dirhams avancé par l’expert, estimant que celui-ci a été fixé arbitrairement et forfaitairement sans détailler le coût des matériaux à remplacer ou à modifier, montant représentant près du tiers du prix total d’acquisition du local. En conclusion, la défenderesse demande le rejet de la requête et, à titre subsidiaire, une contre-expertise. Elle joint en pièces la certification de fin de travaux, la certification de conformité de l’ingénieur des travaux, la certification de conformité du bureau d’études, les rapports techniques, la procuration spéciale pour le recours en faux incident, l’ordonnance judiciaire du 17/11/2023, ainsi que le procès-verbal d’exécution.

Au vu de la réplique de la demanderesse, produite par l’intermédiaire de son mandataire en date du 22/10/2024, réaffirmant que les vices mentionnés dans le rapport d’expertise concordent avec ceux relevés dans l’expertise produite précédemment en exécution de l’ordonnance judiciaire jointe à la requête introductive, et faisant valoir que les arguments de la défenderesse à propos de l’ordonnance rendue en faveur du Syndic de l’immeuble – qui avait demandé l’autorisation d’entrer dans le local de la demanderesse pour y remédier à la fuite d’eaux usées – confirment en réalité les conclusions de l’expertise contestée. La demanderesse précise les circonstances de ladite ordonnance : les résidents de l’immeuble étaient fortement incommodés par les odeurs nauséabondes dues aux eaux usées qui stagnaient devant le local, attirant insectes et nuisibles, de sorte que le Syndic s’est adressé au président du tribunal aux fins de pénétrer dans le local de la demanderesse et y réaliser les travaux d’étanchéité nécessaires. La demanderesse s’est conformée à l’ordonnance, l’ayant autorisé à entrer dans les lieux, alors même que cette procédure se déroulait à l’encontre de la défenderesse. Malgré l’exécution de l’ordonnance, ces dommages demeurent visibles et persistants à ce jour, car le local présente des vices tant au niveau des travaux de gros œuvre que des seconds ouvrages, comme l’ont confirmé l’expertise ordonnée et celle versée précédemment au dossier.

Au vu du renvoi de l’affaire à plusieurs audiences, la dernière ayant eu lieu le 22/10/2024, en présence de Maître Harchaoui, représentant la demanderesse, lequel a produit un mémoire dont copie a été remise à Maître Nasri, représentant la défenderesse, et de la communication au dossier des conclusions du Ministère public.

Le tribunal a ensuite déclaré l’affaire en état d’être jugée et l’a mise en délibéré à l’audience du 29/10/2024.

Après délibéré, conformément à la loi, il est exposé ce qui suit :

Sur la forme
Attendu que les demandes principale et additionnelle respectent les conditions formelles légales, il convient de les déclarer recevables.

Au fond
La demanderesse conclut à la résolution du contrat de vente la liant à la défenderesse, prise en la personne de son propriétaire et représentant légal, M. Moulay Larbi (B.), à la restitution du prix de vente d’un montant de 1 000 000,00 dirhams et au versement d’une indemnité de 350 000,00 dirhams avec intérêts légaux à compter de la date de la demande, en assortissant la décision de l’exécution provisoire et en mettant les dépens à la charge de la défenderesse.

Attendu que le rapport juridique entre les parties est établi par l’acte notarié de vente du 24/03/2023.

Attendu que la demanderesse fonde sa prétention sur l’existence de divers vices affectant l’immeuble objet de la vente, qu’elle n’a pu exploiter depuis sa livraison, et qu’elle en rapporte la preuve par le contrat de vente, le rapport d’expertise et le procès-verbal de constat.

Attendu que, pour instruire l’affaire, le tribunal a, par jugement avant-dire droit, ordonné une expertise technique confiée à l’expert Mansif Hakim. Dans son rapport, ce dernier a conclu que le local litigieux présente de graves vices au niveau tant des ouvrages principaux que des ouvrages secondaires, à savoir :

1. Premier vice : le non-respect des normes généralement reconnues et pratiquées, consistant notamment à prévoir une conduite d’évacuation (colonne de plomberie) reliant l’ensemble des étages, depuis la toiture jusqu’au sous-sol, et la raccorder au réseau d’assainissement de la ville (réseau Lydec), afin d’évacuer toutes les eaux, y compris les eaux usées. Dans l’immeuble concerné, la conduite s’est arrêtée au niveau de la mezzanine, et son parcours a été dévié à l’aide de coudes de déviation et de débouchage (coudes de déviation en PVC), afin de la raccorder au sous-sol, contrairement aux plans autorisés qui ne prévoient pas de colonne de plomberie au niveau de la mezzanine et du rez-de-chaussée. Il aurait fallu prolonger la colonne jusqu’au rez-de-chaussée pour permettre toute intervention future en cas de sinistre, et ce, dans les parties relevant de la copropriété, alors qu’actuellement, elle se situe sous le plafond et la dalle de la mezzanine, donc à l’intérieur de la propriété exclusive de la demanderesse.

2. Deuxième vice : les travaux de plomberie ont été exécutés de manière non professionnelle, portant atteinte à une poutrelle précontrainte adjacente aux canalisations d’alimentation en eau potable, ce qui pourrait affecter la solidité de la dalle à cet endroit.

3. Troisième vice : des infiltrations d’eau visibles sur les murs ont créé une forte humidité, provoquant la dégradation des faux plafonds, l’altération complète de la peinture et causant de sérieux dommages au réseau électrique ; il est probable que de l’eau se soit infiltrée dans les conduits de distribution électrique, entraînant un risque pour la sécurité de l’immeuble. Faute d’une réparation intégrale du réseau de plomberie, laquelle exigerait la prolongation de la colonne d’évacuation depuis la mezzanine et le magasin du rez-de-chaussée jusqu’au sous-sol, le local demeurera exposé à de nouvelles infiltrations, mettant en péril la structure même de l’immeuble et le rendant impropre à toute activité commerciale, en plus de réduire sa valeur vénale.

Le rapport précise également que la réalisation de ces travaux nécessaires, notamment la prolongation de la colonne d’assainissement du plafond de la mezzanine jusqu’à la dalle du sous-sol, imposera des interventions importantes, lesquelles réduiront d’environ 2 m² la surface totale du magasin (1 m² à la mezzanine et 1 m² au rez-de-chaussée). Le coût des travaux de plomberie est estimé à 50 000,00 dirhams, et celui des gros œuvres, y compris les opérations de creusement (gainage) et de modifications structurelles nécessitant l’avis de l’ingénieur en béton ayant supervisé la construction de l’immeuble, ainsi que la reconstruction de la colonne avec remise en état du carrelage, de la peinture et des faux plafonds, est évalué à 120 000,00 dirhams. Au total, ces réparations atteindraient environ 170 000,00 dirhams.

Attendu qu’il ressort du rapport d’expertise que le local objet du contrat de vente liant les parties est entaché de vices majeurs affectant tant la structure que les aménagements secondaires, et que la défenderesse n’a pas respecté les normes en la matière, notamment en ne prévoyant pas une colonne de plomberie traversant tous les étages et reliée aux canalisations d’assainissement, et qu’elle a porté atteinte à une poutrelle précontrainte adjacente aux conduits d’alimentation en eau potable, ce qui compromet la solidité de la dalle, outre les infiltrations d’eau ayant dégradé les plafonds et la peinture, ainsi que l’installation électrique, comme en attestent les photographies jointes au rapport.

Attendu que les contestations de la défenderesse quant au rapport d’expertise ne sont pas fondées, dès lors que l’expert a procédé à une constatation technique sur les lieux, et que la défenderesse n’a produit aucune preuve de nature à invalider ses conclusions. Toutes les exceptions soulevées se révèlent dénuées de fondement et doivent être rejetées. Quant au recours en faux incident dirigé contre le rapport d’expertise, il est irrecevable, la procédure de faux ne visant que les pièces produites par les parties elles-mêmes, alors que le rapport d’expertise constitue un travail propre à l’expert, signé uniquement par lui. L’expertise est en outre régulière, conforme aux points de mission fixés par le tribunal et satisfaisant aux exigences légales. Il convient donc de l’homologuer.

Attendu que l’article 549 du Dahir formant Code des obligations et des contrats dispose : « Le vendeur est tenu de garantir les vices de la chose qui en diminuent sensiblement la valeur ou qui la rendent impropre à l’usage auquel elle est destinée… », et que l’article 556 du même Code prévoit : « Si la garantie est reconnue pour vice ou défaut des qualités essentielles, l’acheteur peut demander la résolution de la vente et la restitution du prix… ».

Attendu qu’il ressort de ces dispositions et des pièces versées au dossier que la demanderesse apporte la preuve de l’existence de vices cachés (dont la découverte requiert un examen minutieux et une expertise) affectant la chose vendue, à savoir le non-respect par la défenderesse des normes de construction et la mauvaise exécution du réseau d’évacuation, avec impact sur une poutrelle précontrainte adjacente à la conduite d’alimentation en eau potable, causant ainsi un danger pour le local, de sorte que l’acheteuse est fondée à solliciter la résolution de la vente et la restitution du prix, en application de l’article 556 susvisé.

Attendu qu’en cas de résolution du contrat, les parties doivent être remises dans l’état où elles se trouvaient avant la conclusion de celui-ci, d’où le bien-fondé de la demande de restitution du prix de vente fixé à 1 000 000,00 dirhams, à laquelle il convient de faire droit.

Attendu que les intérêts légaux courent, dès lors qu’une partie est commerçante, à compter de la date de la demande jusqu’à parfait paiement, conformément à l’article 871 du Dahir précité.

Attendu que la demande d’indemnisation doit être écartée dès lors que la cour a accordé les intérêts légaux et qu’il ne peut y avoir double réparation du même préjudice.

Attendu que la demande d’exécution provisoire n’est pas justifiée en l’absence des conditions prévues à l’article 147 du Code de procédure civile.

Attendu que la partie succombante supporte les dépens en vertu de l’article 124 du Code de procédure civile.

En application des dispositions des articles 5, 6, 13, 14, 15, 16, 17 et 19 de la loi n° 53.95 portant création des tribunaux de commerce, promulguée par le Dahir n° 1.97.65 du 4 Chaoual 1417 (12 février 1997), des articles 1, 2, 3, 31, 32, 50 et 124 du Code de procédure civile, et du Dahir formant Code des obligations et des contrats…

Par ces motifs

Le tribunal, siégeant en audience publique, statuant en premier ressort et contradictoirement :

Sur la forme
Déclare recevables les demandes principale et additionnelle.

Au fond
Prononce la résolution du contrat de vente daté du 24/03/2023 liant la défenderesse, prise en la personne de son représentant légal, à la demanderesse.
Ordonne à la défenderesse, prise en la personne de son représentant légal, de restituer à la demanderesse la somme de 1 000 000,00 dirhams, assortie des intérêts légaux à compter de la date de la demande.
Met les dépens à la charge de la défenderesse.
Rejette les autres demandes.

Ainsi jugé, le présent jugement a été prononcé le jour, le mois et l’année susmentionnés.