Inexécution de l’obligation de payer le salaire : assimilation à un licenciement abusif (Cass. soc. 2023)

Réf : 32291

Identification

Réf

32291

Juridiction

Cour de cassation

Pays/Ville

Maroc/Rabat

N° de décision

1/191

Date de décision

21/02/2023

N° de dossier

3633/5/1/2022

Type de décision

Arrêt

Chambre

Sociale

Abstract

Base légale

Article(s) : 723 - Dahir n° 1-03-194 du 11 septembre 2003 portant promulgation de la loi n° 65-99 relative au Code du travail

Source

Juriscassation.cspj.ma

Résumé en français

La Cour de cassation, saisie d’un pourvoi formé par l’employeur, rappelle que l’obligation de verser le salaire constitue un élément fondamental du contrat de travail. Le défaut de paiement des rémunérations s’analyse comme une rupture unilatérale et abusive du contrat, de sorte que le refus du salarié de reprendre son poste ne peut être assimilé à une démission, mais procède directement de cette inexécution fautive.

L’employeur, qui n’a pas suivi la procédure légale applicable en matière de licenciement pour motif économique, ne saurait se prévaloir de prétendues difficultés économiques pour justifier la cessation du paiement des salaires. Dans ces conditions, la rupture est considérée comme abusive et ouvre droit à l’indemnisation du salarié, sans qu’un examen des difficultés alléguées par l’employeur soit nécessaire.

En conséquence, la Cour rejette le pourvoi et confirme les condamnations prononcées en première instance et en appel.

Résumé en arabe

نظرت المحكمة في نزاع بين مشغل وأجير مطرود، وقد حصل هذا الأخير في المرحلة الابتدائية والاستئنافية على تعويضات عن الفصل التعسفي.

ورأت المحكمة أن عدم دفع الأجور من قبل المشغل، الذي يشكل التزامًا جوهريًا في عقد العمل، يرقى إلى فسخ أحادي وتعسفي للعقد.

ولا يمكن اعتبار رفض الأجير استئناف عمله بمثابة استقالة ضمنية، بل هو نتيجة مباشرة لهذا الإخلال بالعقد.

وتذكر المحكمة بأن الالتزام بدفع الأجر، وهو عنصر أساسي في عقد العمل، يرتب مسؤولية المشغل.

وقد اعتبر عدم دفع الأجور من قبل المشغل انتهاكًا جسيمًا يبرر الفسخ التعسفي، مما يترتب عليه إلزام المشغل بتعويض الأجير دون الحاجة إلى دراسة الصعوبات الاقتصادية المدعاة.

Texte intégral

وبعد المداولة طبقا للقانون:
حيث يستفاد من أوراق القضية ومن القرار المطعون فيه أن المطلوب في النقض تقدم بمقال يعرض فيه أنه عمل لدى الطالبة إلى أن تم فصله بصفة تعسفية، ولأجل ذلك التمس الحكم له بالتعويضات المترتبة عن ذلك، وبعد انتهاء الإجراءات المسطرية أصدرت المحكمة الإبتدائية حكمها القاضي على الطالبة بأدائها لفائدة المطلوب في النقض مجموعة تعويضات عن الاجرة والضرر والاخطار والفصل والعطلة السنوية مع تمكينه من شهادة تحت طائلة غرامة تهديدية قدرها 100 درهم. استأنفته الطاعنة فقضت محكمة الإستئناف، بتأييد الحكم المستانف فيما قضى به، وهو القرار موضوع الطعن بالنقض.

في شأن وسيلة النقض الفريدة:
تعيب الطاعنة على القرار المطعون فيه، عدم الارتكاز على اساس قانوني ونقصا  التعلیل الموازي لانعدامه وعدم الرد علی الدفوعات، ذلك انها تمسكت في سائر مراحل الدعوی باجراء بحث لمعرفة الأسباب الداعية الى الازمة التي تعرضت لها والتي ادت الى خفض نشاطها وكذا لمعرفة الاجراءات التي اتخدتها من اجل الحفاظ على العمال ومناصبهم، لكن محكمة الاستئناف لم تعر دفعها اي اهتمام ولم تحل عنه في يعليلها، وان الطالبة لم تتوقف نهائيا عن نشاطها وانما قلت المردودية نظرا لتراجع المبيعات وطلبيات الصيانة بسبب فسخ العقد مع شركتي (س) و(ف) اللتان كانتا تسيطران على اسطول النقل الحضري بكل من الرباط سلا وتمارة مما ادى الى خلل في ميزنيتها ولو كان العكس لسلكت المسطرة الواجب اتباعها لفصل الاجراء لأسباب اقتصادية واقفلت مايول حبل بصفية نهائية وسرحت عمالها، وان اجراء بحث لن يعرقل سير الملف، وبعدم استجابة المحكمة لطلبها تكون قية اضرت بمصالحها، مما يتعين معه نقض القرار.

لكن حيث انه لما كان الاجر يعتبر ركنا اساسيا من اركان عقد الشغل فان توقف المشغلة الطالبة عن اداء اجور المطلوب في النقض يعتبر مساسا بركن جوهري في العقد، وان عدم التحاق هذا الاخير بعمله لايعد مغادرة تلقائية للعمل وانما فصلا مشوبا بالتعسف من جانب الطاعنة ويترتب عنه تعويض الاجير، ولا موجب لاجراء بحث حول اسباب توقفها عن اداء اجور المطلوب في النقض طالما انها لم تسلك مسطرة الفصل لأسباب اقتصادية والمحكمة المطعون في قرارها لما اعتبرته قد فصل تعسفيا للسبب اعلاه ورتبت الاثار القانونية على ذلك تكون قد عللت قرارها تعليلا سليما وغير خارق لاي مقتضى قانوني والوسيلة على غير اساس.

لهذه الأسباب
قضت محكمة النقض برفض الطلب وتحميل الطالبة الصائر.

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Version française de la décision

Après délibération conformément à la loi :

Attendu qu’il ressort des pièces du dossier et de la décision attaquée que le défendeur au pourvoi a introduit une requête exposant qu’il a travaillé pour la demanderesse jusqu’à son licenciement abusif, et qu’il a, par conséquent, demandé à ce qu’elle soit condamnée à lui verser les indemnités y afférentes. Après l’accomplissement des procédures prescrites, le tribunal de première instance a rendu son jugement condamnant la demanderesse à payer au défendeur au pourvoi un ensemble d’indemnités pour salaires, dommages et intérêts, préavis, licenciement et congés payés, avec exécution provisoire sous astreinte de 100 dirhams. La demanderesse a interjeté appel, et la Cour d’appel a confirmé le jugement entrepris en ce qu’il a décidé, décision qui fait l’objet du pourvoi en cassation.

Sur le moyen unique de cassation :

La demanderesse reproche à la décision attaquée de ne pas être fondée sur une base légale, d’être insuffisamment motivée, ce qui équivaut à une absence de motivation, et de ne pas avoir répondu aux moyens de défense. Elle soutient avoir fait valoir, à tous les stades de la procédure, qu’une enquête avait été menée pour connaître les causes de la crise qu’elle a traversée et qui a conduit à la réduction de son activité, ainsi que pour connaître les mesures qu’elle a prises pour préserver les employés et leurs postes. Cependant, la Cour d’appel n’a accordé aucune attention à son argument et n’y a pas répondu dans sa motivation. La demanderesse affirme qu’elle n’a pas cessé définitivement son activité, mais que sa rentabilité a diminué en raison de la baisse des ventes et des commandes de maintenance due à la résiliation du contrat avec les sociétés (S) et (F) qui contrôlaient la flotte de transport urbain à Rabat, Salé et Témara, ce qui a entraîné un déséquilibre dans son budget. Si le contraire avait été vrai, elle aurait suivi la procédure de licenciement pour motif économique, aurait définitivement mis fin à son activité et aurait licencié ses employés. Elle ajoute qu’une enquête n’aurait pas entravé le cours de l’affaire, et que le refus de la Cour de faire droit à sa demande lui a porté préjudice, ce qui justifie la cassation de la décision.

Mais attendu que le salaire étant considéré comme un élément essentiel du contrat de travail, le fait que l’employeur demanderesse ait cessé de payer les salaires du défendeur au pourvoi constitue une atteinte à un élément fondamental du contrat. L’absence du salarié à son poste de travail ne constitue pas un abandon de poste, mais un licenciement abusif de la part de la demanderesse, qui oblige à indemniser le salarié. Il n’y a pas lieu de mener une enquête sur les raisons pour lesquelles elle a cessé de payer les salaires du défendeur au pourvoi, dès lors qu’elle n’a pas suivi la procédure de licenciement pour motif économique. La Cour, dont la décision est attaquée, ayant considéré qu’il y avait eu licenciement abusif pour le motif susmentionné et en ayant tiré les conséquences légales, a légalement justifié sa décision, et le moyen est non fondé.

Par ces motifs,

La Cour de cassation rejette le pourvoi et condamne la demanderesse aux dépens.

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