La Cour d’appel de commerce de Casablanca confirme un jugement rejetant une action en contrefaçon et concurrence déloyale engagée par la société titulaire des marques « VATIKA » et dérivées (« DASUR VATIKA », « DASUR VATIKA NATURALS », etc.), visant à interdire l’utilisation par la défenderesse de la marque « AKTIVA », jugée similaire et potentiellement source de confusion pour le consommateur moyen. La demanderesse alléguait notamment l’existence d’un « trompe-l’œil » ou « imitation par évocation », résultant d’un choix délibéré d’éléments visuels et phonétiques proches de ses marques protégées.

Pour rejeter l’action, la Cour retient que le seul fait qu’il existe un « similitude partielle » entre les marques en conflit (« VATIKA » et « AKTIVA »), limitée à quelques lettres communes, n’est pas suffisant à caractériser une contrefaçon dès lors que les marques se distinguent clairement par leur prononciation et leur impression globale auprès du consommateur. Elle souligne que l’appréciation du risque de confusion doit être effectuée à partir de l’impression générale produite par les marques prises dans leur intégralité, et non à partir d’éléments isolés.

En outre, la Cour précise que l’allégation de reprise des couleurs et des formes des modèles industriels utilisés par la demanderesse n’a pas de pertinence juridique en l’espèce, dès lors que l’action est strictement fondée sur la protection des marques et non sur les dessins ou modèles industriels.

Enfin, la Cour écarte également le grief de concurrence déloyale, indiquant que l’existence d’une simple similitude partielle, insuffisante pour induire le consommateur en erreur ou provoquer une confusion sur l’origine des produits, ne peut caractériser une pratique anticoncurrentielle.

En conséquence, la Cour rejette l’appel et confirme intégralement le jugement entrepris, condamnant l’appelante aux dépens.

Après en avoir délibéré conformément à la loi

En la forme :

Attendu que la société (D. I) Ltd a interjeté appel, par l’intermédiaire de son avocat, à l’encontre du jugement n°19793 rendu le 23/12/2014 par le Tribunal de commerce de Casablanca dans le dossier n°4139/16/2014, qui avait déclaré recevables les requêtes initiale et additionnelle, mais les avait rejetées au fond en mettant les dépens à la charge du demandeur.

Attendu que l’appel a été présenté selon les formes légales, dans le respect des délais et accompagné du paiement des frais judiciaires ; il est donc recevable en la forme.

Au fond :

Attendu qu’il ressort des pièces du dossier que la société appelante a saisi, par son conseil, le Tribunal de commerce de Casablanca par requête enregistrée le 06/05/2014, exposant qu’elle est spécialisée dans la fabrication, la production et la distribution dans le monde entier, y compris au Maroc, de divers produits de catégorie 3 (cosmétiques, produits de nettoyage, parfums de qualité supérieure, huiles capillaires), sous plusieurs marques lui appartenant, notamment les marques déposées auprès de l’Office marocain de la propriété industrielle : VATIKA, DASUR VATIKA, DASUR VATIKA NATURALS, VATIKA DANRUFF GUARD, VATIKA HAMMAM ZAITH DEEP CONDITIONG. Elle indique avoir découvert, sur le marché marocain, des produits hydratants et de soins capillaires portant une marque figurative contrefaite et imitant sa marque, avec les mêmes couleurs et formes, sous le nom d’« AKTIVA ». En exécution de l’ordonnance rendue par le président du Tribunal de commerce de Casablanca le 31/03/2014, l’huissier de justice, M. Hissof Mustapha, s’est rendu dans les locaux de la société intimée, boutique vendant des produits cosmétiques, et y a constaté la présence de 1200 échantillons contrefaits. L’appelante précise également que l’intimée utilise des expressions lui appartenant, notamment « CELEBRATE LIFE », reproduites identiquement sur ses véhicules et sur son site internet www.xtradis.com. Elle sollicite, en conséquence, l’interdiction pour l’intimée de fabriquer, exposer, vendre ou importer tout produit portant la marque figurative AKTIVA ou utilisant la marque VATIKA inversée, notamment sur les véhicules, sur le site web www.xtradis.com, dans ses locaux et documents commerciaux, sous astreinte de 50 000 dirhams par infraction constatée après jugement, ainsi que la destruction des produits saisis le 08/04/2014 aux frais de l’intimée, la confiscation de tous les produits portant sa marque, la publication du jugement dans deux journaux (français et arabe) et la condamnation à payer des dommages-intérêts de 25 000 dirhams avec exécution provisoire et dépens.

La société appelante a également déposé une requête additionnelle le 08/09/2014, sollicitant la nullité des marques de l’intimée : AKTIVA GOLD (n°159.119 du 17/04/2014), xtradis AKTIVA naturals (n°159.120 du 17/04/2014) et AKTIVA (n°118.245 du 01/07/2008), ainsi que leur radiation du registre national des marques.

Attendu que le Tribunal de commerce de Casablanca a rendu le jugement susmentionné ;

Attendu que la société appelante reproche au jugement d’avoir rejeté sa demande en se fondant uniquement sur l’existence d’une similitude partielle entre les marques VATIKA et AKTIVA, estimant que le tribunal a méconnu les principes généraux du droit de la propriété intellectuelle, selon lesquels la contrefaçon doit s’apprécier globalement par l’impression créée chez le consommateur moyen. Elle souligne que la similitude provient non seulement du choix similaire des lettres, mais également des couleurs et des formes des modèles industriels, créant ainsi une imitation par évocation.

Attendu que l’intimée soutient en réponse que le jugement attaqué a valablement rejeté les prétentions de l’appelante, rappelant que la contrefaçon implique une reproduction exacte d’une marque déposée, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, et qu’aucun texte légal ni jurisprudence ne reconnaît la notion d’« imitation par évocation » telle que décrite par l’appelante.

Attendu que le ministère public conclut au rejet de l’appel et à la confirmation du jugement ;

Après examen des conclusions échangées et les débats tenus à l’audience du 27/10/2015, l’affaire a été mise en délibéré au 17/11/2015.

Motivation :

Attendu que l’appelante maintient ses moyens d’appel ;

Attendu que le grief tenant à l’existence d’une identité entre les marques est non fondé, dès lors que, comme le relève le jugement contesté, il existe uniquement une similitude partielle entre les marques VATIKA et AKTIVA portant sur certaines lettres, ce qui ne suffit pas à constituer une contrefaçon, les marques se distinguant clairement au niveau phonétique et globalement dans l’esprit du consommateur ;

Attendu que le grief relatif à l’imitation des couleurs et des formes des modèles industriels de l’appelante est inopérant, l’action étant exclusivement fondée sur la protection de la marque elle-même et non sur les modèles industriels ;

Attendu enfin que, concernant le grief de concurrence déloyale, une similitude partielle insuffisante à créer un risque de confusion pour le consommateur ne saurait constituer un acte de concurrence déloyale ;

Par ces motifs, il convient de rejeter l’appel comme non fondé et de confirmer intégralement le jugement attaqué, les dépens restant à la charge de l’appelante.

PAR CES MOTIFS

La Cour d’appel de commerce de Casablanca, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

En la forme : Déclare l’appel recevable.

Au fond : Rejette l’appel, confirme le jugement entrepris, condamne l’appelante aux dépens.